je suis retourné à Samara 11 Illustration Brase d'Anjou

william1941 Lun 31 Aoû 2020 - 1:24

Jeudi 29 septembre1983

Huit heures quinze.
Bzz, bzz, bzz
« - Oui
- votre taxi monsieur.
- Coming »
Huit heures quarante. Le taxi m’arrête à un bloc du 1201 Peachtree
Je finis à pied, regarde autour de moi.
Rien de suspect !
1201. J’entre dans un immense hall.
Face à moi un comptoir, un employé en uniforme.
Je lui dis que j’ai rendez-vous aux bureaux de la Continental Steel corporation avec mons…
Il n’écoute pas la suite. Il prend un téléphone: « Votre visiteur est arrivé.
Il écoute. Raccroche.
- On vient vous chercher. ».
Quelques instants plus tard, une jeune femme sort d’un des ascenseurs qui garnissent le côté droit du hall.
« Monsieur Fortrain ? Si vous voulez bien me suivre. »
Manifestement je suis attendu.
Nous montons dans les étages et ressortons dans un autre hall. Plus petit.
Une porte s’ouvre. Deux hommes en sortent, s’avancent vers moi.
Pas de présentation !
« Si vous voulez-bien… »
Coin salon d’un vaste bureau.
Je me prépare à sortir le dossier du porte-document.
Le plus âgé m’arrête. « Inutile Monsieur Fortrain »
Je les regarde, interrogatif.
Le plus jeune me remet une grosse enveloppe :
« Si vous voulez bien prendre connaissance de ces documents ».
Je m’imagine en train de lui dire non et de ficher le camp… J’ouvre l’enveloppe.
Une série de documents dans une chemise, une enveloppe plus petite avec mon nom dessus (enfin Fortrain) et la mention ‘’personnelle’’ en rouge. Cachet et signature de mon boss sur le rabat
Je l’ouvre.
Une feuille. Le contenu est bref.

Vérifiez la conformité des bons de commandes et des ordres de livraisons qui vous seront présentés avec ceux contenus dans le dossier joint et signez-les sans dater
Vérifiez les montants et signez les bons à payer sans dater
Vous n’emporterez aucun document à l’issue de ce rendez-vous.
AUCUN
Signature et cachet du patron.

Traduction : j’aurai pu m’éviter tout le travail préparatoire d’hier.
Autant pour l’acheteur chevronné dont on voulait paraît-il utiliser le savoir-faire pour crédibiliser l’opération.

J’ouvre la chemise.
Mes interlocuteurs me présentent des bons de commande.
Pas de nom de société.
Je les compare avec les copies sorties de la chemise.
Tout est conforme.
Idem pour les ordres de livraison. Je remarque qu’ils ne comportent pas d’adresse de livraison ni de nom de transporteur. Juste la référence du bon de commande
Même chose avec les bons à payer. Pour chacun, les références du bon de commande et le nom de la banque tirée sont mentionnés. Pas le bénéficiaire.
Tout est conforme
Je signe tous les documents du nom de Fortrain

Rien à voir avec ce que j’ai apporté.
Je me prépare à partir quand le plus jeune me demande le dossier que j’ai apporté.
AUCUN DOCUMENT ! Je le lui remets. Je n’ai plus aucune trace de ce qu’il vient de se passer. Même mes pouvoirs pour cette opérations sont entre les mains de mes interlocuteurs.
Ils se lèvent.
Nous nous saluons et le plus jeune m’invite à le suivre.
Un couloir assez long au bout duquel il y a un ascenseur.
Nous descendons. Nous sortons. Une rue, manifestement à l’arrière du bâtiment.
Une voiture garée à quelques mètres. Elle avance vers nous: « La voiture va vous raccompagner. Au revoir Monsieur Fortrain. Merci de votre visite. »
Je ne sais même pas le nom de mes deux interlocuteurs !
Je n’ai pas encore compris ce qu’il s’est passé que nous sommes arrivés à l’hôtel.
Je retourne à ma suite et j’essaie de rassembler mes esprits.
Qu’est-ce que c’est que ce cirque ?
Je ne trouve pas.
Il est à peine dix heures quinze.
Je reprends la road map pour vérifier le trajet pour Winston
Pas trop compliqué
Interstate 20 direction Birmingham ou Memphis
Distance 30 miles environ
Il faut sortir d’Atlanta et il faudra chercher l’adresse à Winston
Je décide de partir tout de suite.
Je mangerai à proximité du lieu de rendez-vous.
Winston camp manufacturing 2590 Jason Industrial Parkway.
Je réalise brusquement que je ne peux pas louer une voiture !
Avec mon permis français il me faudra présenter mon passeport avec le visa touriste !
Sauf que mon permis n’est pas au nom de Fortrain.
J’envisage d’appeler de Lavière.
Réflexion faite je me dis que j’ai de l’argent. Je vais prendre un taxi.
‘’Ils‘’n’avaient qu’à y penser.
Du coup je prends le problème autrement.
Je vais manger à l’hôtel, partir ensuite.
Je demande à la conciergerie de me retenir un taxi pour un aller-retour à Winston cet l’après-midi, départ 13h30.
Je prépare le dossier Winston dans le porte-document et décide d’aller prendre l’air.
Je mangerai un morceau au lunch-bar de l’hôtel avant de partir.
Je suis à la porte pour sortir…
Mer…e, j’allais oublier de prendre rendez-vous à Indianapolis.
Retour au bureau. Dossier Indianapolis (3). Premier Feuillet.
J’appelle.
-Titanium Industries may I help you
- I would need an appointment tomorrow with M. Emil Rolite
- Just a minut please
Silence
- Emil Rolite’s office. May I help you
Je me présente et sollicite un rendez-vous pour le vendredi 30 en expliquant mes contraintes d’horaire.
Silence
- Emil Rolite speaking. It will be nice to meet you tomorrow at twelve so we could have lunch together. Is that ok for you?
- I really will appreciate sir.
- Done. Have a nice day
- have a nice day sir.
Ouf, j’ai failli me mettre dans le pétrin !
C’est quand même curieux qu’il m’invite à manger.
Là encore, on verra bien. Je commence à être rôdé aux surprises.

Je fais une proposition à Totoche : Un tour en ville. Retour à midi pour le repas.
Elle se laisse convaincre et nous voilà partis.
Pas trop m’éloigner Je flâne dans les rues voisines de Peachtree.
Pas grand-chose à voir. Deux supermarchés à l’air assez misérable. Beaucoup de boutiques au rideau baissé. Des maisons en bois assez décaties.
Le contraste est brutal avec Peachtree ou le nouvel aérogare flambant neuf.
La crise a frappé ici aussi.
Ellis st, Fairliest st, Williams st, Forsyth st. Je reviens pour manger.
Totoche a fait une petite déprime et cessé de participer à la ballade.
A l’hôtel je passe à la conciergerie. M’assure que mon taxi est bien retenu.
Presque offensé, le chasseur derrière le comptoir me répond que bien sûr monsieur. Et il ajoute : « vos billets sont dans votre suite. »
Je le remercie chaudement, pour le réconforter. Me dirige vers le lunch-bar, pour me restaurer.
Je mange rapidement et remonte dans ma suite.
Les billets sont bien sur le bureau. Je jette un œil rapide. Une erreur est si vite arrivée. Mais non monsieur, pas à la conciergerie du Ritz Carlton d’Atlanta.
Je prends des dollars pour pouvoir payer le taxi. Le porte-document avec le dossier Winston, et je redescends
Une idée me traverse l’esprit : mettre la note du taxi sur la facture de l’hôtel. Je me rends à la réception où j’expose ma demande. L’employé plonge dans les documents derrière son comptoir et me répond que « Oui monsieur c’est tout à fait possible. »
Il prend un téléphone sous le comptoir, compose un numéro à 3 chiffres.
Petit entretien. « C’est réglé monsieur. »
Décidément de Lavière ne m’avait pas menti : tout est réglé jusqu’à mon départ.
Treize heures trente, je sors de l’hôtel.
Le portier me salut et lève la main.
Je cherche des yeux un taxi jaune foncé, la norme à Atlanta

je suis retourné à Samara 11 Illustration Brase d'Anjou 11_b10

Ô Dieux hospitaliers, que vois-je ici paraître, dit l’animal etc….?
La Cadillac du consulat !
Je comprends brusquement qu’ils sont un peu moins bêtes que je ne l’avais pensé.
Le coup du permis, ils l’avaient prévu. Ils se sont donc tenus au courant auprès de l’hôtel.
Ou l'hôtel les tient systématiquement au courant.
Ils ont réagi dès qu’ils ont su que j’avais réservé un taxi.
Et le taxi de ce matin ?
Je suis surveillé ?
Par qui ?
Je demande à Totoche ce qu’elle pense de tout ça.
Tu me vides, tu me nettoies et tu me ranges. OK ?
Je lui donne satisfaction en partie seulement : Elle est déjà vidée. Je la fourre dans la poche pour tenir compagnie à ma blague.
Direction la cadillac.
C’est le même chauffeur qu’hier.
Il sort et m’ouvre la porte.
« - Bonjour monsieur.
- Bonjour. Nous allons à Winston au Camp Manuf…
- Je connais la destination monsieur.
Je commence à en avoir assez !
Un peu sèchement je demande
- Qui vous l’a donnée ?
Il ne se départ pas de son calme.
- Elle est sur ma fiche de service monsieur. »
Eh bien voyons ! Elle est sur ma fiche de service monsieur.
Qui l’a établi sa fiche ? Mystère.
Je me calme en me disant que cet homme n’est pour rien dans tout cela.
Quoi que…