Mon grand-père disait

La chanson est bonne mais bien peu réaliste.
L'artillerie était bien trop éloignée des tranchées pour voir ce qu'il s'y passait (et c'est toujours le cas).
Quant à viser un soldat en particulier avec un canon...

En 1914, le départ au front présenté par les journaux était bien loin de refléter la réalité car, même si la propagande vendait cela comme une promenade, la population n'était pas idiote au point d'y croire. Ils n'aimaient pas ça, mais ils ne savaient que faire (et ceux qui pouvaient y échapper s'empressaient de le faire ou d'essayer d'obtenir une bonne planque). Et après 3 ans de service militaire (oui, c'était trois ans à cette époque!) ils obéissaient. Avant de croire ces morceaux de propagande, demandez vous si le gars qu'on arrachait à sa famille, à ses enfants et les parents qui voyez partir leurs enfants étaient vraiment soulevés d'enthousiasme. Et s'ils pensaient spontanément à mettre une fleur au bout du fusil de ceux qui partaient. Que penseriez-vous? Que feriez-vous? 
Dans mon village, qui comptait à l'époque 1500 habitants, il y a 73 noms gravés sur le monument aux morts.
Mon grand-père(qui à 32 ans a laissé derrière lui une femme et un enfant) n'y est pas inscrit. Il a eu de la chance: il n'a laissé qu'un morceau de jambe à Verdun. et quand il est revenu, à 34 ans, on lui a offert une jolie prothèse en bois et une médaille.
Ça, ce n'est pas la guerre des livres d'Histoire. Non, c'est juste l'histoire d'un homme qui l'a faite.
Je vais me faire encore une petite bouffarde. J'ai besoin de penser. Je ne pourrais pas dormir.
Bonne nuit à tous

Cette phrase de ton grand père me rappelle une autre pensée d'un de mes aïeuls dans une correspondance avec sa femme.

Il était sur le front (malheureusement tué en 14-18 comme tant d'autres…). Alors qu'il se trouvait dans une tranchée poisseuse en plein hiver, il disait :
"Moi je ne comprends pas ceux qui ne parviennent pas à dormir. Quand on a sommeil on dort."

ça m'a toujours marqué de lire ça.

motored a écrit:Cette phrase de ton grand père me rappelle une autre pensée d'un de mes aïeuls dans une correspondance avec sa femme.

Il était sur le front (malheureusement tué en 14-18 comme tant d'autres…). Alors qu'il se trouvait dans une tranchée poisseuse en plein hiver, il disait :
"Moi je ne comprends pas ceux qui ne parviennent pas à dormir. Quand on a sommeil on dort."

ça m'a toujours marqué de lire ça.

Très juste. C'est comme cela qu'arrivent les accidents de la route quand le conducteur lutte contre le sommeil. 
Encore faut-il avoir sommeil! Et la peur empêche le sommeil.
 Il faut être sacrément fataliste pour dormir en sachant qu'à chaque instant ion peut être pulvérisé par un obus!

william1941 a écrit:

motored a écrit:Cette phrase de ton grand père me rappelle une autre pensée d'un de mes aïeuls dans une correspondance avec sa femme.

Il était sur le front (malheureusement tué en 14-18 comme tant d'autres…). Alors qu'il se trouvait dans une tranchée poisseuse en plein hiver, il disait :
"Moi je ne comprends pas ceux qui ne parviennent pas à dormir. Quand on a sommeil on dort."

ça m'a toujours marqué de lire ça.

Très juste. C'est comme cela qu'arrivent les accidents de la route quand le conducteur lutte contre le sommeil. 
Encore faut-il avoir sommeil! Et la peur empêche le sommeil.
 Il faut être sacrément fataliste pour dormir en sachant qu'à chaque instant ion peut être pulvérisé par un obus!

Les réactions des hommes face a la guerre et ses horreurs est bien souvent surprenant, et peut-être inimaginable et incroyable pour beaucoup de gens. 
Dans ma famille, le sang versé pour la patrie a été assez abondant. Un arrière grand père legion d'honneur, qui a perdu une jambe a verdun et à qui l'état a octroyé la gestion du tabac de la Salvetat sur agout, qui existe toujours, a côté du monument aux morts. Un grand oncle mort en 40, un autre à servi en indo, deux grand père qui ont fais l'Algérie, un en tant que volontaire et l'autre conscrits, un père qui a servis 17 ans sous les drapeaux, au Cambodge sous l'ONU, au Rwanda juste avant les massacres, et un grand frère qui a fais deux séjours en Afghanistan.  
Mon père et moi étant férue d'histoire, histoire militaire principalement, j'ai lue énormément de recit de guerre fais par des soldats, et ça permet de comprendre en partie la psychologie de l'homme qui subit avec fermeté son sort. De voir que finalement, ces hommes s'accroche, parce qu'il faut bien survivre, et surtout parce qu'il y a les copains. Les copains, c'est bien souvent ce qui fais que les types ne déserte pas ou peu, tiendront plus longtemps que leur nerf ne le permet, résisteront mieux aux privations. Les armée en guerre sont des machines où l'individu est broyé, et c'est bien normal, sinon il n'y a pas d'armée.

Je vous conseille de lire, entre autres :
le soldat oublié, de Guy Sajer, un des livres les plus puissant que j'ai lu.
Les carnets de guerre 1941-1945, de Nikolaï Nikouline.
Carnet de guerre 1914-1918, de Ernst Jünger
Le classique, A l'ouest, rien de nouveau, de Erich Maria Remarque.
Et pour finir Verdun, de Jacques-henri Lefebvre.

Ton propos est très intéressant.
Il m'a permis de différencier le militaire et le soldat.
J'ai été soldat en Algérie et je ne me suis jamais senti militaire.
Le militaire adhère. Le soldat subit.
Je comprends l'esprit militaire. Je respecte les valeurs qu'il véhicule
Je ne conteste pas son utilité, mais ma pipe proteste quand on l'oblige à risquer d'être cassée juste parce qu'on lui dit que c'est son tour.
Pour ce qui est de la désertion en 14 la facture était simple: Le Tourniquet et 11 balles puisqu'il y en avait toujours une à blanc.
Ça calme les velléités!
J'ai fait mon "devoir" en participant à la tragi-comédie de la guerre d'Algérie. J'ai eu de la chance. J'en suis revenu indemne. 25 000 morts  65 000 blessés pour défendre quoi? Certainement pas la Patrie. Si?
Ma vie a été coupée en trois. Avant, pendant et après. et j'ai parfois du mal à remettre les trois morceaux ensemble. J'ai parfois l'impression que ce sont trois personnes différentes qui cohabitent dans mon esprit.
Mais je considère que finalement j'ai eu beaucoup de chance dans ma vie.
"Quoi Totoche?
-T'en as pour longtemps?
- Tu as raison. J'arrête.
- On va sortir?
- Pas tout de suite. J'attends un coup de fil
- Je peux avoir un peu de mélange perso?
- Non. Je t'ai expliqué que je fais une cure de tabac anglais.
- C'est pour longtemps.
- Pour quelques jours au moins.
- J'aime bien les anglais.
- Oui mais pour l'instant ce ne sera pas toi mais une Dunhill.
Je t'emmenerai en balade tout à l'heure.
- C'est sûr? Parce qu'avec toi on sais jamais"