À l'attaque !

Ceci est le récit d'un acte de grande bravoure  
que j'ai commis quand j'étais soldat de sa majesté
au sein de l'ABL (Armée Belge-Belgisch Leger)




La nuit tirait à sa fin, j’avais somnolé de temps à autre, assis à même le sol le dos callé contre un tronc d’arbre, me relevant parfois pour aller vérifier si, la section de fusillés d’assaut que je commandais par accident, était toujours bien en place le long de la route et que les gars ne dormais pas tous en même temps.

Le ciel commençait à rosir là bas à l’Est, l’aube nous apportait une fraîcheur réparatrice après cette longue nuit d’attente, nuit chaude de l’été continental Allemand. Une demi heure tout au plus et le jour se lèverait, nous libérant de notre mission, nous permettant de retrouver nos tentes et nos sacs de couchage.

Notre bataillon effectuait des manœuvres, en juin 1976 dans la plaine de Höne pas très loin d’Hambourg et de la frontière de l’Allemagne de l’Est, si ma mémoire géographique est fidèle. Demandez à ceux qui sont passé par ce coin, c’est très simple quand on n’est pas habitué au climat, l’été les soldats cuisent sous leurs casques et l’hiver, ah l’hiver, c’est atroce pour un être humain habitué à vivre en zone tempérée !

J’y étais passé au cours d’un exercice de deux semaines en février de la même année au volant d’une jeep Willys du peloton éclaireur, véhicule débâché et pare brise rabattu, pour assurer une visibilité de 360 degrés, aux 4 hommes composant l’équipage. Nous roulions de jour comme de nuit. Si la journée la température de 12 à 16 degrés sous zéro était très pénible à 60 ou 70 Km/h, la nuit venue, le thermomètre chutait en flèche vers moins 22, voir moins 25 et rouler dans ces conditions c’était je vous l’ai déjà dit : ATROCE !

Donc la vie militaire me ramenait une nouvelle fois en ces lieux paradisiaques, mais en juin, ici, l’été s’est bien implanté et le soleil est chaud, très chaud.
Je ne viens plus avec les éclaireurs cette fois mais à la tête d’une section de transport composée de 9 camions, le mien compris, du type MAN poly carburant et vu la chaleur nous nous sommes empressé de débâcher les cabines de nos engins. Ma section fait partie du peloton transport d’un bataillon d’infanterie blindée.

La veille des événements que je vous conte, à la fin de la journée, en bon chef de section, je veillais à ce que la maintenance de mes engins soit bien assurée par les chauffeurs et portais mon attention au niveau d’huile de mon propre véhicule car j’avais remarqué depuis quelques jours qu’il avait tendance à en consommer plus que de coutume. Je pensais que la chaleur et 12 à 14 heures de route par jour ne devaient pas être étrangers à la chose et vu que malgré ce petit désagrément le bahut se comportait bien je n’avais vu aucune raison de le présenter à la section technique qui était particulièrement sollicitée en cette période de manœuvres de longue durée.
En effet, nos chars AMX 13 tombaient en panne dans tous les coins, le big boss, notre vénéré colonel que cela rendait d’une humeur exécrable, passait sa rage sur l’officier commandant le peloton maintenance, qui en bon gradé répercutait la vindicte de son supérieur sur ses propres subalternes. Tous les mécanos, du premier sergent major, aux sergents, aux caporaux et simples soldats de cette unité technique, tous vous dis-je étaient à crans et l’idée de présenter le camion chez eux pour un problème somme toute mineur ne me tentait vraiment pas, c’était comme aller fumer une cigarette au cœur d’une raffinerie d’essence.

Il y avait déjà l’adjudant du bureau transport qui me cherchait des crosses, cela suffisait largement à mon bonheur.
Un bonheur comblé il est vrai par la chaleur, ah oui, je l’appréciais cette chaleur.
Mes hommes s’en plaignaient tout en transpirant abondamment et je leur remontais le moral en leur racontant mes douloureuses aventures en ces lieux quelques mois plus tôt, leur rappelant aussi que derrière leur volant il avaient de l’air un peu frais en roulant tandis que les fusillés qui galopaient dans la poussière en tenue de combat, le barda sur le dos, le casque sur la tête, le fusil à la main ou à l’épaule étaient bien plus à plaindre que les chauffeurs MAN.

à suivre

Vivement la suite !

Ah oui, le décors est posé, on attend les actes

ça commence bien ..vite la suite 

La suite, la suite !

Entre nos poètes et nos conteurs d'histoires*, quel bonheur !

'Au passage, Ric, ça fait drôle quand tu parles de "sa majesté"... Il y a bien plus de 200 ans, LouisXVI, couic!

Même si je ne cautionne pas les brutalités infâmes commises au nom de la République.
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je vais essayer de m'y mettre, afin de conter mes jeunes années, mais je suis un peu complexé de ne pas avoir la "verve plumistique" adéquate.

Enfin, je tenterais le plongeon dans les années 50/60/septante...

'Au passage, Ric, ça fait drôle quand tu parles de "sa majesté"... Il y a bien plus de 200 ans, LouisXVI, couic!

Pour vous Français cela peut "faire drôle" comme tu dis
mais la Belgique qui depuis sa seconde indépendance en
1830 vit sous une monarchie parlementaire, cette expression
est des plus courante !

De plus dans l'imbroglio politique actuel, l'institution royale
est le seul facteur d'une certaine stabilité...

Et puis, peut-être ne le sais tu pas mais dans les veine de
nos souverains actuel coule du sang du dernier roi de France
Louis-Philippe 1er dont la fille avait épousé le premier roi
des Belges Léopold 1er.


Bien amicalement ET (bien sûr) bouffardeusement
Ric

Voici donc la suite du feuilleton :




J’étais donc tout accaparé par le niveau d’huile de mon camion quand une voix gouailleuse me tira de mon occupation.
-- « Tu as des projets pour ce soir, Ric ? »
Après avoir méticuleusement remis la jauge en place, je me retournais vers ce grand rouquin dégingandé de sergent CSOR Martin dont j’avais reconnu la voix. (CSOR pour candidat sous-officier de réserve, un sergent milicien quoi !)
-- « Comme d’hab, Charly, j’irai ingurgiter ma paie à la tente qui sert de mess, et nous écouterons quelques vieux caporaux et sous-officiers  nous parler de la discipline qui se perd et du temps heureux, pour eux où notre unité était un bataillon semi-disciplinaire. »

Charles Martin était le seul sous-officier avec le quel je m’étais réellement lié d’amitié, en général je ne les fréquentais pas, bien sûr j’étais un chef de section mais comme tous les chefs de section du transport nous étions des engagés qui avions plus d’un an de service et qui avions été bombardé à ces postes par manque de cadres. Les responsabilités et difficultés d’un commandement, même subalterne sans les avantages du grade, car nous n’étions toujours que des troufions.

Martin sourit de toutes ses dents, il s’essuie le front avec son béret, car malgré l’approche de la soirée, il fait encore bougrement chaud, le tape plusieurs fois sur une cuisse et le remet lentement, d’une manière un rien précieuse qu’il affectait parfois. Sous mon regard intrigué et interrogatif il éclate de rire, un rire franc et sonore comme je les aime, le rire d’un type qui est capable de te dire que tu es son meilleur ami avec la plus profonde sincérité et l’instant d’après de t’ordonner toujours avec un sourire suave, un truc des plus désagréables.

-- « Ric, j’ai une bonne et une mauvaise nouvelle pour toi, par laquelle préfères tu que je commence »
-- « Bof… La bonne Charly, la bonne ! »
-- « OK petit frère, la bonne nouvelle c’est que tu ne subiras pas de sermons sur la discipline qui se perd et la mauvaise c’est que tu ne toucheras pas une chope ce soir, j’ai une mission de nuit dans le cadre de nos manœuvres, il me faut un camion pour transporter mes sbires (ses hommes) et j’ai pensé à toi vieil branche »

Petit frère était une expression d’amitié que nous échangions de temps à autre. L’idée de rouler encore une nuit alors que je venais de me farcir 12 heures de route ne me réjouissait pas trop, par contre faire route avec Charly ne me déplaisait pas, donc l’un dans l’autre la situation me convenait assez mais pour le jeu qui s’établissait entre nous à cet instant, je prenais un air profondément résigné et demandais tristement :
-- « Charles Martin, moi qui te prenais pour un ami, quelle déception de voir combien je me suis trompé, tu n'es qu’un foutu galonné comme les autres, pourquoi moi ? Hein ! Pourquoi moi ? Il y a près de 50 MAN dans ce putain de bataillon, et c’est le mien que tu choisis mais juste ciel, Charly pourquoi ? »
J’avais terminé mon cirque en le secouant violemment par un bras, la voix aigue et des larmes aux yeux. Un très court instant décontenancé le sergent éclata de rire :
-- « Ric, tu es impayable, tu aurais du faire du théâtre ou être acteur de ciné… Pourquoi toi ? Mais parce que tu es un ami voyons ! Bon sérieusement Richard, départ dans trois quarts d’heure »
-- « Charly ? »
-- « Oui citoyen »
-- « Ben, pour la bière »
-- « Oui, quoi la bière ? »
-- « Rien, c’est juste pour te dire qu’il y en a un casier plein sous mon siège »
-- « Je devrais vous sanctionner soldat après ce coupable aveux, mais si tu partages l’ami fermera les yeux » dit il en éclatant de rire avant de filer en courant pour se préparer.

merci pour le partage de tes souvenirs Ric

 ah bah oui c'est sympa, j'attends la suite, sans te mettre la pression 
C'est nouveau pour moi de lire un feuilleton 

Purée on y est en plein, j’adore ta plume, vivement demain lol

Vive le Roi......des belges....

MERCI POUR LUI !

Tu sais, perso, je suis plutôt républicain,
mais la république est impossible dans un
pays coupé en trois ! Avec dans la principale
de ses communautés des extrémistes de droite
qui veulent faire éclater le pays...

Ca monte en pression ton aventure !

L'auvergnat a écrit:Ca monte en pression ton aventure !

Patience, patience, le dénouement sera à la hauteur
de tes, de vos attentes à tous (enfin je crois) !

Les hommes embarqués dans la caisse, je referme la ridelle et grimpe derrière le volant tandis que le CSOR Martin, prend ses aises sur la banquette deux places des convoyeurs.
-- « Tu aurais pu faire monter un de tes hommes devant avec toi ! »
-- « Pas de favoritisme, Ric et puis je veux être le seul à partager ton casier camarade chauffeur »
-- « Je te reconnais bien là, camarade sergent ! Si tu me disais maintenant ou nous allons petit frère »
-- « Roules, roules, je t’indiquerai la route, arrivé à destination tu devras cacher le camion dans la forêt, puis avec mes sbires nous devront attendre l’arrivée d’un blindé ennemis qui doit paraît-il passer dans le coin, ce n’est même pas certain et l’intercepter. Ce sont des manœuvres Belgo Allemande, et l’ennemi à intercepter est un char Allemand, pas un léopard, un petit char éclaireur, je n’en sais pas plus. »

Nous avions parcouru environ 60 bornes de routes forestières goudronnées dans la nuit tombante, Charly lisait sa carte à la lueur de sa lampe torche ABL tout en sirotant une de mes chopes.
-- « A 500 mètres à droite Ric, tu verras un petit chemin forestier, tu y entreras et t’arrêteras à 300 mètres de la route pour qu’on ne puisse pas voir le bahut, moi je vais disposer mes hommes le long de la route, c’est dommage que de l’autre côté de cette route il n'y ait que des champs, j’aurais bien aimé une attaque par les deux côtés, mais bon, on fait avec le terrain ».

A l’endroit indiqué, je découvre l’entrée du dit chemin et m’y engage, il fait pratiquement nuit maintenant, une nuit chaude et parfumée de toutes les fragrances de la sylve environnante, 300 mètres et je stop. Quel silence assourdissant soudain, il vous faut savoir qu’un moteur de MAN poly carburant c’est bruyant et plus bruyant encore en débâché. Alors quand le bruit du moteur s’est éteint, nous sommes restés là un moment sans bouger pour profiter de cet instant si court qui pourtant semblait s’éterniser dans la nuit. Puis les sbires de Charly ont commencé à remuer dans la caisse, cette phase de communion avec la nature était finie, j’ouvrais la portière et sautait de mon siège.

Comme je touchais le sol j’entendis un hurlement de douleur de l’autre côté de la cabine, puis une invraisemblable volée de jurons tous plus gratinés les uns que les autres. Je longeais le camion vers l’arrière, ouvrais la ridelle pour permettre aux hommes de descendre et pendant qu’ils se regroupaient je me dirigeais vers l’endroit d’où les jurons venaient maintenant comme une litanie rageuse. Assis sur une souche Charles Martin se tenait la cheville gauche tandis  que de ses lèvres retroussées en rictus de douleur, les pires horreurs continuaient à s’échapper comme une sordide complainte.
-- « Putain de bordel de merde de non de Dieu de saloperie de connerie racine de mes deux, j’ai trébuché et me suis claqué la cheville. Ric, je ne peux plus marcher ! »

Après une nouvelle tentative infructueuse pour se déplacer et quelques dizaines de gros mots plus colorés, grossiers et mal sonnants les un que les autres Charly du bien admettre l’évidence, il était dans l’incapacité de se faire un pas sans souffrir horriblement. Cette prise de conscience s’accompagna chez mon ami d’une très pittoresque bordée de noms d’oiseaux à faire pâlir de jalousie le Capitaine Haddock lui-même.

Malgré la gravité du moment je ne pu m’empêcher de laisser échapper un éclat de rire au quel répondit un rageur « Tu trouves ça drôle toi ? »
-- « Mais non, pas du tout, ce sont tes gros mots qui le sont, pardon, c’est plus fort que moi » dis-je en me mettant une main sur la bouche pour faire taire mon rire qui prenait de l’ampleur.

Dans la nuit qui nous enveloppait maintenant, les yeux de Charly brillaient d’une fureur à peine contenue, il grogna entre deux gémissements de souffrance
-- « Ric il y a des moments ou j’ai envie de t’étrangler ! »
Puis regardant ses hommes qui nous entouraient sans savoir quoi faire il cria : -- -- « Aidez-moi à monter dans la cabine bande de glandeurs ! »

Quand il eu trouvé une position confortable ou disons plutôt, pas trop inconfortable, sur la banquette passagers, il ordonna à ses hommes de m’obéir comme à lui car c’est moi qui commanderait la section pour intercepter le blinder ennemi.

J’avais beau lui avancer des argument contre cette idée, il restait intransigeant, campant sur ces positions, arguant inlassablement que j’étais dans l’armée depuis 20 mois, que ses bleus à lui sortaient à peine d’instruction, que depuis sept mois j’occupais un poste de chef de section, que j’avais acquis un minimum de capacités à commander et que somme toute, intercepter un char pendant des manœuvres ce n’était pas comme pendant une guerre. Il termina dans une grimace de douleur en soufflant :
-- « Faut que tu le fasses Ric, c’est comme un jeu, rien de plus mon vieux ! »

À suivre

Eheh eh! Génial !

Ric le Gaumais a écrit:Et puis, peut-être ne le sais tu pas mais dans les veine de
nos souverains actuel coule du sang du dernier roi de France
Louis-Philippe 1er dont la fille avait épousé le premier roi
des Belges Léopold 1er.

Techniquement le dernier Roi de France fut Charles X, Louis-Philippe n'a jamais porté ce titre.

Weston a écrit:

Ric le Gaumais a écrit:Et puis, peut-être ne le sais tu pas mais dans les veine de
nos souverains actuel coule du sang du dernier roi de France
Louis-Philippe 1er dont la fille avait épousé le premier roi
des Belges Léopold 1er.

Techniquement le dernier Roi de France fut Charles X, Louis-Philippe n'a jamais porté ce titre.

Louis Philippe était roi des français, c'est ça la nuance ?

C'est juste pour éviter les bagarres que la Belgique a été créée !!!

Oh punaise Ric, je n'y tiens plus, je viens de lire (de me délecter de tes mots plutôt) et adorer ce 3e épisode et je n'attends que la suite

Après avoir usé de toute la panoplie d’arguments dont je disposais, comme mon sergent n’en démordait pas, j’acceptais d’aller jouer à la guerre le long de la route là-bas derrière nous. Mais je ne partis qu’après avoir vérifié que Charly fut installé le mieux possible et sortis le casier de sous mon siège.
« Merci petit frère, gémit-il, ça pourra durer toute la nuit, on ne sait pas à quelle heure il passera ce satané blindé »

J’avais donc éparpiller la section du sergent Martin le long d’une portion de la route, leur expliquant que les gros pétards qu’ils avaient avec eux, les tunderflash, représentaient des blindicides, en manœuvre et que dès que nous verrions le char il faudrait les lancer le plus près possible de lui… Ensuite ben… On improviserait. »

Et nous revoici au début de ce récit, le ciel commençait à rosir là bas à l’Est, l’aube nous apportait une fraîcheur réparatrice après cette longue nuit d’attente, nuit chaude de l’été continental Allemand. Une demi heure tout au plus et le jour se lèverait, nous libérant de notre mission, nous permettant de retrouver nos tentes et nos sacs de couchage.

Je songeais avec délice à l’instant où je donnerais l’ordre du rassemblement et du réembarquement quand un des sbires se pointe en courant comme si l’enfer tout entier était à ses trousses. Rouge malgré l’obscurité encore épaisse, essoufflé et haletant il parvient à ahaner le mot que je craignais maintenant d’entendre – « Le char, le char il arrive ! »

-- « Nous l’avons attendu toute la nuit cet engin maudit, nous allons nous le faire ce non de Dieu de char ! » criais-je aux hommes qui m’entouraient, incertains de la conduite à suivre. A mon grand étonnement, une clameur belliqueuse me répondit.

Je ne me connaissais pas cette capacité à éveillé l’ardeur guerrière des autres, j’avais signé un contrat de 2 ans et il me restait encore 4 mois à faire avant d’enlever ce manteau trop pesant qu’est l’uniforme que j’avais endosser sans savoir ce qu’était l’armée.

Nous nous alignons à plat ventre au bord du talus d’un mètre qui bordait la route côté forêt. Nos tunderflash prêts à l’emploi, le fusil mitrailleur, est en batterie et les hommes ont leur FAL (fusil automatique léger) à côtés d’eux, pour ma part j’ai la traditionnelle mitraillette vigneron des chauffeurs. Tout le monde à des balles à blanc, bien sûr.
Nous sommes tendus comme des cordes d’arcs à flèches, le petit gars à côté de moi tremble d’excitation. Quelqu’un me crie :
-- « Richard, il n’est pas loin on entend son moteur ! »
-- « OK les gars, silence maintenant, attendez mon ordre ! »

Moi aussi, je suis excité, excité comme une puce devant son premier lévrier afghan. Dans la nuit mourante la forme du blindé apparaît, muni de petit phares qui n’éclairent pas grand-chose, je me dis que ce sont des feux de guerre, c’est bien notre char ! Je crie encore aux soldats :
-- « Attendez qu’il soit tout près, attendez mon ordre ! »

Lentement, tranquillement le blindé ennemi vient vers nous, sur de lui, inconscient du piège tendu.

Mais dans l’énervement et la tension du moment, mes gamins, ils ont 18 ou 19 ans, moi 24, c’est leur première manœuvre et moi je ne suis pas un vrais sous-officier, ils craquent n’attendent pas mon ordre et vlan voilà les tuderflash qui partent les un après les autres, beaucoup trop tôt !
Tous nous sommes debout et lançons maintenant toute notre réserve de pétards simili blindicides.

Le char ralenti et bifurque à gauche, fonce dans le champ en face de nous, il fait 50 mètres et s’arrête, le moteur tourne au ralenti. Je hurle
-- « A l’attaaaaque ! »
Et nous voilà criant comme des fous, dévalant le talus, traversant la route, et entrant à notre tour dans ce champ.

Et soudain, là, juste devant nous, dans le matin qui titube encore apparaît un type en salopette bleue !

Pour celles et ceux qui n’ont pas eu la joie ineffable d’aller à l’armée il faut qu’ils sachent qu’en manœuvres à cette époque les uns étaient en kaki et les autres qu’on appelait l’ennemi conventionnel portaient des salopettes bleues.

À suivre...

Super, tu sais faire des cliff hanger, y a pas à dire