Tranquille, je bourre ma pipe

"Oh Jaufré, si tu as des couilles,
Du culot et des tripes,
Fais donc une ballade en "ouille",
En "ot" et puis en "ipe"
(Dixit: mon éditrice)



Ballade

Quand je n’ai plus rien dans les fouilles,
Plus rien pour payer mon écot,
Quand je rentre sec et bredouille
Du champ, du turbin, du boulot,
Quand j’ai atteint le fond du pot,
Quand j’ai usé toutes mes fripes,
Alors je cure mon culot :
Tranquille, je bourre ma pipe.

Quand on me cherche des embrouilles,
Quand chacun veut placer son mot,
Quand on dispute et qu'on bafouille,
Quand le sage ressemble au sot,
Quand on s’envoie des noms d’oiseaux,
Quand on s’étrille et qu'on s’étripe,
Moi, je sirote un bon Pernod :
Tranquille, je bourre ma pipe.

Quand le monde part en quenouille,
Quand gronde le bruit des sabots,
Quand montent le bruit des patrouilles,
Des hurlements et des sanglots,
Quand de la mort les noirs caillots
Déploient leurs sinistres polypes,
Moi, je m’accoude à mon bistrot :
Tranquille, je bourre ma pipe.

Envoi:
Prince, tel est mon maître-mot,
Ma philosophie, mon principe,
Et le remède à tous mes maux :
Tranquille, je bourre ma pipe.

Jaufré Cantolys

Merci à tous! je suis content que vous ayez apprécié ma ballade...

Druide a écrit:Ça m'a rappelé une fois où assis seul en terrasse alors que la nuit tombait je fus témoin d'une bagarre entre deux dealers...

... Et qu'elle fasse écho à vos expériences vécues!

Pierrot Gourmand a écrit:En tant que candide dans le domaine, il faudra m'expliquer exactement ce qu'est un envoi. Le seul et unique que je connaissais est celui à la fin de la chanson Billy le Bordelais (qui pourrait sans doute t'inspirer une version pipes que j'en suis sur)

Merci Pierrot pour cette chanson de Joe Dassin que je ne connaissais pas!
Une "ballade" est une forme poétique assez ancienne, dans laquelle François Villon était passé maître. Elle comporte 3 strophes (en général de 8 octosyllabes) qui tournent toujours sur les 3 mêmes rimes. Toutes les strophes se terminent par un même vers appelé "refrain". La ballade se conclut par une dédicace d'une demi-strophe appelée "envoi". L'envoi commence toujours  par le titre du dédicataire, en général: "Prince" (tradition qui remonte aux troubadours du Moyen-Age). Par exemple dans la Ballade des Dames du temps jadis (de Villon chantée par Brassens):

Prince, n'enquérez de semaine
Ou elles sont, ne de cest an
Qu'a ce refrain ne vous remaine:
Mais ou sont les neiges d'antan?

Tout à fait!

Ah non! C'est un peu court jeune homme!